lundi 17 octobre 2016

Ma vie de patiente Acte 3 : La désolation

Nous y voilà, l'acte 3, l'acte final, que dis-je, le dénouement de ces trois semaines et demi d’hospitalisation ! 

Du mardi 4 octobre au jeudi 13 octobre : 

Alors que je pensais mettre un terme à ma colocation en commettant l'irréparable, une aide extérieure m'a été proposée. La nature est tout de même bien faite ! (Rooh mais non, elle n'est pas décédée, j'ai déménagé !) 

J'ai donc refait mon paquetage pour la quatrième fois en quelques jours. Le nom du service était flatteur, il promettait soleil et bonne humeur. Direction "Les maladies infectieuses et tropicales" ! (Ben quoi y a tropique quand même ! Vous vous attendiez à quoi ? Ça promet tout de même plus d'exotisme qu'un service où les coloscopies sont le Graal des examens non ?). En vrai, je savais à quoi m'attendre puisque j'y avais déjà séjourné. J'en gardais un plutôt bon souvenir. (Trucs et astuces de l'hôpital : Toujours se limiter, autant que possible, à vos souvenirs. Retenter l'expérience dans un service ou d'un examen qui vous avait semblé "plutôt sympathique", peut s'avérer être une très très trèèèèès mauvaise idée.) 

Première bonne nouvelle : la colocation est désormais définitivement terminée ! Je rejoins une chambre seule. J'ai donc tout le loisir d'écouter la télévision, de lire, de sortir quand bon me semble ! 

J'ai vite déchanté...Et j'ai vite pris conscience que ce qui fait notre bien-être à l'hôpital est déterminé par plusieurs composantes. 

1) Une chambre accueillante. Ne vous attendez pas à la suite de Kate.... mais avoir un vrai lit est déjà un bon commencement (pour avoir passé des nuits sur des brancards aux urgences, je peux vous assurer qu'avoir un lit c'est chouette !) . Disposer d'une salle de douche (Avec un peu de chance vous aurez même une cabine de douche, mais alors ça c'est rare et c'est du luxe !) et de toilettes, est également appréciable. Enfin, la télévision (que vous payerez la modique somme de 5 euros par jour. Si, si c'est cadeau !) est le caviar du séjour. (Sinon vous pouvez faire des mots fléchés, c'est bien les mots fléchés !) 

2) Un personnel à l'écoute... Et compétent, cela va de soi. Il est toujours plus facile de dire que l'on souffre à un être humain qui vous considère d'égal à égal. Je sens que vous voulez un exemple vous ! Bon... ok.. Mais alors on va faire ça sous forme de petit jeu. 

Je vais énoncer des situations (qui sont toutes déjà arrivées bien entendu, et vous devrez définir si selon vous, c'est une bonne attitude ou une mauvaise attitude. Il n'y a pas de pièges, mais il faut être bien attentif et se rappeler des règles simples de vivre ensemble.

Cas 1 : La fameuse prise de tension (oui encore et toujours elle !). 

Situation A : 

Une personne en blouse entre dans votre chambre. (C'est un bon indicateur la blouse, parce qu'il arrive que des gens entrent dans la chambre mais soient de parfaits inconnus... Ils regardent partout dans la chambre, pour finalement s'apercevoir qu'ils ne sont pas dans la bonne ! Et ça arrive plus souvent qu'on ne le pense !) 
 Donc une personne en blouse entre dans votre chambre, une drôle de machine à la main. Sans un bonjour elle vous demande de tendre le bras, vous enroule un bout de tissu froid autour, vous accroche une pince au bout du doigt et dans le même temps vous fourre un thermomètre dans la bouche ou dans l'oreille (Les deux sont tout à fait possible !) Elle vous laisse ensuite plantée là, pianotant sur son ordinateur dans le couloir. Au bout de quelques minutes elle revient, récupère son matériel et s'en va. 

Situation B : 

 Une personne en blouse entre dans votre chambre, une drôle de machine à la main. Elle lance un bonjour amical et chaleureux. Tout en installant son matériel, elle vous explique qu'elle vient prendre vos constantes. Pendant que le tensiomètre fait son travail, elle échange quelques mots avec vous. Elle vous annonce ensuite qu'elle va prendre votre température. Puis sort en susurrant un "A bientôt". 

D'après vous, quelle situation est la plus correcte ? (Chuut gardez, la réponse pour vous, vos petits camarades n'ont peut-être pas encore trouvé ! Faut dire que c'est pas facile facile !)

Cas 2 : Le respect du sommeil

Situation A : 

Une personne en blouse (oui toujours ! Surtout pendant la nuit sinon faut vraiment vous poser des questions !) entre dans votre chambre de manière discrète et silencieuse. N'ayant aucun soin particulier à vous faire et ayant constaté que vous dormiez paisiblement (et donc que vous respiriez toujours), cette personne refermera la porte calmement. Elle ne reviendra plus pendant la nuit (sauf si soins particuliers bien entendu) et réapparaitra le lendemain matin aux alentours de 7 heures. (Horaire largement acceptable dans une vie à l'hôpital !)

Situation B :

Une personne en blouse, entre dans votre chambre à 23h45 avec une voix forte (C'est à dire un volume adapté à  la criée sur le port, ou sur le marché de Saint-Denis) et avec un dynamisme inadapté (C'est à dire quand tu sens que la porte sera bientôt dégondée), pour finalement vous lancer non nonchalamment : "Hé bonjour à ma patiente préférée !!! Elle pleure ? " (Non elle dormait mais c'est vrai que la frontière est mince entre ces deux verbes ! Et peut-on décréter une préférence après seulement quelques minutes passées en commun ? Non parce que dans ce cas-là j'adore Vincent Lindon, je l'ai aperçu dans une voiture pour de vrai ! (mais vraiment pour de vrai hein !)) 
"Bon ben j ai rien à vous faire. L infirmière m avait dit de vous laisser tranquille car j allais sûrement vous réveillez mais fallait bien que je vous dise bonsoir hein !' (Ben oui, ça aurait été dommage de laisser dormir tranquillement ses patients !) 
Enfin et pour couronner le tout, cette même personne trouvera adapté de venir changer un pommeau de douche à 5h30 du matin. (Pommeau qui doit être changé toutes les semaines pour des raisons d'hygiène et dont le remplacement, montre en main, dure 15 secondes.)

 D'après vous, quelle situation est la plus correcte ? 

Cas 3 : L'écoute et la considération du patient 

Vous êtes une personne régulièrement hospitalisée. Vous connaissez donc parfaitement votre corps, les soins qu'on vous prodigue (et peut-être même que vous les pratiquez vous-même dans votre maison parce que vous avez été formé pour !), et vous comprenez le jargon médical. (Enfin, en règle générale.) Un infirmier doit vous poser un cathéter ou faire une énième prise de sang.

Situation A : 

Vous lui expliquez que les seules veines qui fonctionnent encore se trouvent sous les poignets et sur la main. Bien que l'infirmier n'aime pas piquer à ces endroits en règle générale, il vous fait confiance et y va franco. Bingo ! Cela fonctionne.

Situation B :

Vous lui expliquez que les seules veines qui fonctionnent encore se trouve sous les poignets et sur la main. L'infirmier vous rétorque que vous semblez avoir de bien jolies veines, que vous êtes jeune et que ça a l'air trop fastoche de piquer, et que lui en plus il SAIT faire ! Tâtant à tout va, il choisi sa proie. Il ouvre un laaaaarge bec et... (Ah non pardon, je me suis perdue !) 
Il détermine donc la veine la plus propice. Une fois la grande gagnante trouvée, vous lui répétez encore une fois que c'est peine perdue, que ses collègues ont déjà essayé et que les veines gognent (Interrogation surprise ! Que veut dire Gogner ???)
Avec un joli cathéter rose, il se concentre de toutes ses forces. (Alors le choix du cathé, ok ou bien .... ?) Et bam, la veine cède ! (Loin de vous l'attitude goguenarde !) Le pensant repenti, vous tentez désespérément de lui rappeler l'astuce de vos veines peu sollicitées. Mais c'est bien mal connaitre l'infirmier fier et vaillant (ou pas) qui repart à l'attaque d'une nouvelle veine à traumatiser. Au bout de 3 (voir 6 essais parfois), il convient que vous aviez peut-être raison et fini par vous écouter. (C'est d'ailleurs ce qui le mènera à la réussite !) Enfin, ce même infirmier affirmera lors de la relève du matin (ben oui il est venu à 5 heures du matin faire son petit prélèvement) qu'il ne vous a jamais piquée. (Et oui conscience professionnelle quand tu nous tiens !)

 D'après vous, quelle situation est la plus correcte ? (J'ai jamais dit que c'était facile !) 

Cas 4 : Le respect des protocoles 

Vous êtes une personne régulièrement hospitalisée. Vous connaissez donc parfaitement votre corps, les soins qu'on vous prodigue (et peut-être même que vous les pratiquez vous-même dans votre maison parce que vous avez été formé pour !), et vous comprenez le jargon médical. (Enfin, en règle générale.) Oui je récapitule ! Dites donc vous, pendant que vous passiez le code, est-ce que vous avez dit quelque chose à la petite voix qui répétait toujours la même chose ? Est-ce que ça vous semblait si incohérent que ça qu'elle vous serine alors qu'un gros feu rouge était affiché : A) Je m'arrête B) Je ralentis. C) Je ralentis et je passe ? Non je ne crois pas ! Alors ! On peut continuer ? 

Donc vous connaissez vos protocoles puisque vous les mettez en application depuis plus d'un an et demi dans votre doux foyer. En constatant que ces derniers ne sont pas respectés vous vous interrogez. (Et vous flippez aussi parce que c'est un tout petit peu avec votre vie qu'ils sont en train de jouer !)

Situation 1 : On vous dit que tout est normal. Qu'ils ont l'habitude de travailler. L'une des blouse blanche vous propose même de se mettre en stérile (c'est à dire de porter un masque, une blouse, une charlotte, des gants  et d'utiliser du matériel emballé en utilisant une méthode bien particulière pour ne pas tout souiller) pour vous faire plaisir. Malgré vos invectives et vos tentatives désespérées pour lui faire comprendre qu'il ne s'agit pas d'un caprice mais bien d'une nécessité, il continuera à vous faire comprendre que c'est bien "pour vous faire plaisir". (Oh vous lecteurs masculins, arrêtez d'emmener vos copines aux restos et ne leur offrez plus des fleurs ! Non, pour leur faire plaisir mettez vous donc en stérile, vous verrez effet garanti !) 
Pour justifier d'un manque de rigueur (parce que oui, c'est bien de ça qu'il s'agit), on vous rétorquera que le personnel ne dispose pas de suffisamment de temps ! (Ha ben ma p'tite dame, c'est à dire que votre maison elle n'a pas de toit, mais c'est qu'on n'a pas suffisamment de temps NOUS pour poser les tuiles ! Déjà on vous a mis la charpente, c'est pas mal, mais c'est bien POUR VOUS FAIRE PLAISIR !)

Situation 2 : Ben en fait y en n'a pas parce qu'on ne m'a jamais écouté ! 

Du coup je ne peux pas vous demander quelle situation est la plus respectueuse, mais je vais vous poser une colle tout de même. 
A votre avis, le manque de temps justifie-t-il également, le fait qu'on mélange toutes les substances dans une unique perfusion ? En clair, est-il acceptable de passer tous les fluides en même temps sans aucune précaution sur la compatibilité des produits ? (Oh non ils ne l'ont pas fait hein c'est juste pour savoir... Ha ben si en fait... Ils l'ont fait aussi...) 

Bon et pour finir, un troisième point essentiel à une hospitalisation vécue de manière positive : 

3) Des médecins compétents... Et à l'écoute cela va de soi (Ah on me dit dans l'oreillette, que non en fait !) 

Loin de moi l'idée de juger de la compétence d'un médecin ou d'un autre. Surtout quand ce dernier est encore en étude... Qu'il a devant lui un récapitulatif de vos antécédents et qu'il est incapable de comprendre ce qui est écrit... Non, non, non, pas de ça chez moi ! 

En revanche... pour l'écoute ? Hum...Bon je sens que les cas pratiques ça vous plait. Dernière petite interrogation pour terminer ce palpitant chapitre. (Vous ne direz plus que le médical ça ne fait pas rire hein !)

Si une patiente expose ses inquiétudes quand aux méthodes utillisées pour manipuler son Broviac (Qui est précieux rappelons-le) à un chef de service. La réponse la plus appropriée selon vous est : (Attention je me suis permise d'imaginer des réponses possibles, ben ouais dans la réalité, y en a qu'on n'entendra jamais... c'est trop gros !) 

Réponse 1 : 

Mais Mademoiselle, je comprends tout à fait vos inquiétudes et c'est pourquoi je vous propose de vous mettre à disposition le matériel nécessaire et de vous laisser manipuler à votre convenance. Vous êtes formée, nous avons donc entière confiance ! 

 Réponse 2 : 

Mais Mademoiselle, vous êtes dans un service infectieux ici je pense quand même savoir éviter les risques non ? Et je fais entière confiance en mon équipe ! 

Réponse 3 : 

Mais Mademoiselle, je vais me mettre en relation avec les médecins de nutrition pour échanger sur nos différents protocoles et réfléchir à la solution la plus adéquate. Nous prenons en compte vos craintes et comprenons ces dernières. 

Vous avez 3 minutes.... 


Le jeudi 13 au matin, la libération, j'ai cru qu'ils avaient été au bout de toutes les bêtises possibles : pas de désinfection avant branchement (ni après hein !), manipulation à risque, tubulures laissées pendues sur la potence pendant de longues minutes (y en a même une qui est tombée !), réveils intempestifs, prises de sang et poses de cathéters tumultueuses. Bref ! Du grand niveau. 

Mais finalement c'est la cadre de santé qui m'a fait le plus rire et qui a mis un point final à tout ça. 

- Bon Mademoiselle Briochette, vous avez vos papiers, vos ordonnances. On vous laisse sortir... Hum sinon vous avez quoi comme voie ?
- Un broviac. 
- Un broviac ok. Donc bon ben vous allez sortir avec...  

C'est à dire que ça m'arrangerait ! Histoire que je ne me sois pas coltinées deux semaines d'antibiotiques pour rien .... 

On aura beau dire, on aura beau faire mais c'est ce genre de petites choses qui vous rappelle combien la vie vaut le coup d'être vécue... Ca serait dommage de ne pas pouvoir en rire une fois rentrée au chaud chez soi non ! J'ai quand même de la veine de pouvoir raconter tout ça ! (Comique de répétition sur la veine ! Je vous l'avais pas dit depuis l'acte 1 ?)

Ps : Je vous laisse réfléchir aux cas ci-dessus, petit corrigé plus tard !

3 commentaires:

  1. Au final, c'est moins dangereux de se faire tatouer en matière d'hygiène... La dernière fois que je me suis fait tatouer, la fille a carrément changé le cordon qui relie l'alimentation à la machine parce qu'il était tombé par terre, et elle met un masque à chaque fois!

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    1. Ouais mais ça c'est parce qu'elle ne travaille pas en infectieux haha ! Mais oui je te rejoins sur l'idée ! Je vais peut être finir par passer le cap :)

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    2. J'ai fini par passer le cap et pour la première fois de ma vie aucune infection, cicatrisation parfaite...ça fait réfléchir! 😁

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